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Passion curry : ces synergies d'épices qui font voyager nos papilles

Korma végétarien

L’hiver est là et avec lui : la grisaille, le froid, et au marché, le choix de légumes qui diminue doucement sur l’étalage des maraîchers.
Notre plat préféré en cette saison : un bon curry avec ses mélanges d’épices aux vertus antiseptiques, réchauffantes, circulatoires, qui vont améliorer la résistance de notre corps pendant ces longs mois.

Aujourd’hui, les currys ont conquis la planète et sont devenus des stars de la street-food. Mais comment en est-on arrivé là ?

Suivez-nous du côté de l’Inde pour un coup d’œil rapide sur l’histoire de ce plat, avant qu’on vous parle des principales épices qui composent la pâte de curry et de leurs utilisations médicinales traditionnelles.

Et pour ceux qui veulent mettre la main à la pâte, retrouvez à la fin de l’article un lien vers un de nos mélanges préférés.

Palak paneer

Mais d'abord, c'est quoi un curry ?

La question peut paraître idiote, mais il faut dire que souvent, on n’a qu’une idée assez vague de ce que signifie le mot "curry". Et en fait, c’est bien normal, parce qu’à la base, il s’agit d’un mot-valise utilisé par les Britanniques pour désigner, en vrac, tous les plats en sauce épicés qu’ils mangeaient en Inde. C’est un peu comme si on avait un seul mot pour désigner à la fois la blanquette, le pot-au-feu, le coq-au-vin, le bourguignon, etc. Le mot "curry" lui-même viendrait de "kari", qui veut dire "sauce" ou "condiment pour le riz" en tamoul, langue parlée notamment au Sud de l’Inde et au Sri Lanka. Pour ne rien simplifier, cette appellation a été aussi donnée par les marchands anglais aux mélanges d’épices qui allaient permettre à leurs acheteurs de recréer ces plats en sauce… Ainsi était née la poudre de curry, à laquelle on est tellement habitués qu’on en oublie souvent qu’elle est en fait un mélange de différentes épices !

Alors évidemment, des plats en sauce à base d’épices, on en trouve dans bien des coins du monde. Et finalement ce terme de curry, on l’a trouvé si pratique qu’on va aujourd’hui parler de curry africain, japonais, thaïlandais, jamaïcain… pour désigner tout un tas de préparations épicées venues des quatre coins du monde, avec des mélanges d’épices propres à chaque culture gastronomique.

On va ici rester du coté du sous-continent indien, où l’habitude de cuisiner avec des mélanges d’épices remonte à environ 4 000 ans : les épices étaient employées bien sûr pour leur saveur, mais aussi pour améliorer la conservation et la qualité sanitaire des aliments dans un contexte où les méthodes modernes de préservation n’existaient pas. L’art d’utiliser les épices en cuisine s’inscrit donc dans une très, très longue tradition en Inde, et nous qui avons la chance d’y avoir passé quelques mois pouvons vous confirmer que c’est dans les maisons, et pas dans les restaurants, qu’on peut goûter les meilleurs plats : car les mélanges d’épices sont des trésors familiaux, qui se transmettent de génération en génération et font souvent la fierté d’un foyer.

Tout ça pour dire que parler de la recette du curry, finalement, ça ne veut pas dire grand-chose. On retiendra quand même que le curcuma est l’ingrédient principal de nombreuses variantes de poudres de curry du commerce. C’est lui qui leur donne cette belle couleur orange qu’on associe généralement au curry (le plat) ! Ainsi, on va distinguer le curry en poudre du garam massala par exemple, un autre mélange d’épices omniprésent dans les currys, qui n’est lui pas à base de curcuma et ne donnera pas à la sauce une belle couleur dorée… Pas si simple !

Malai kofta végétarien

Zoom sur quelques currys célèbres

Alors, si on résume : on peut en fait regrouper sous le terme "curry" un nombre incalculable de plats de différentes origines, même si le mot désignait à la base des mets indiens. Mais finalement, la plupart des currys célèbres que nous connaissons sont plutôt des versions occidentalisées, d’abord créées et popularisées à travers les établissements tenus par des immigrés indiens, et qui ont fini par connaître un immense succès avant de plus ou moins se standardiser.

Parmi les currys plus connus, on peut citer :

  • Le korma : Il s’agit d’un plat légèrement épicé, dont la sauce est généralement épaissie par des noix de cajou.
  • Le tikka masala : Ce plat en sauce est composé de morceaux de viande ou d’alternatives végétariennes, qui sont généralement marinés dans du yaourt et du garam masala, cuits au four, et servis dans une sauce épicée et crémeuse.
  • Le vindaloo désigne des plats originaires de la région de Goa (ancienne colonie portugaise du Sud-Ouest de l’Inde), dont l’originalité réside dans l’utilisation de vin ou de vinaigre. Il est issu de la rencontre entre les cultures culinaires indienne et portugaise.

Plantes et épices à currys alliées de notre immunité

Maintenant que nous y voyons plus clair, revenons à nos plantes et à l’aide précieuse qu’elles peuvent nous apporter pour combattre les pathogènes. Voici un portrait rapide de quelques-unes de celles que l’on trouve fréquemment dans les currys :

  • Le Curcuma (Curcuma longa) : On l’a dit, cette superstar des épices est la plante phare de nos currys. Et pas seulement pour la belle couleur qu’elle leur donne : aujourd’hui, les propriétés du curcuma ont fait l’objet d’un grand nombre d’études, et il est considéré comme l’une des plantes médicinales les plus puissantes qui existe. C’est notamment à la curcumine qu’il devrait une grande partie de ses multiples propriétés : antiseptique et immunostimulant, ce sont surtout ses puissantes vertus anti-inflammatoires qui l’ont rendu célèbre. Le curcuma est aussi un grand allié de notre système digestif, par son action protectrice sur le foie, les muqueuses et la flore intestinale. Et, ne l’oublions pas, le système digestif joue un rôle clé dans nos défenses immunitaires : en effet, c’est lui qui permet l’assimilation (ou non) des nutriments dont notre organisme a besoin pour fonctionner et se défendre, et en même temps, la muqueuse intestinale est aussi une grande zone de vulnérabilité pour notre organisme, qui mobilise des mécanismes de défense complexes et sophistiqués.
  • L’Ail (Allium sativum) : La connaissance des vertus antiseptiques et fortifiantes de l’ail remonte à des millénaires, et cette plante a su traverser les âges sans jamais perdre son aura quasi-surnaturelle : utilisée au temps des pharaons pour soutenir l’effort des esclaves, en Rome antique pour fortifier les soldats, au Moyen Âge pour se protéger de la peste… jusqu’à la Seconde Guerre mondiale au cours de laquelle, dit-on, l’armée russe eut recours à l’ail après avoir épuisé son stock de pénicilline. Si l’ail se distingue particulièrement par son action antibactérienne et antivirale, qui a été très largement documentée, on peut souligner qu’il est, lui aussi, protecteur du foie et de la flore intestinale.
  • Le Gingembre (Zingiber officinale) : Considéré en médecine chinoise traditionnelle comme une plante réchauffante et circulatoire, les premières traces écrites de son utilisation remontent à plus de 3 500 ans. Le gingembre agit à différents niveaux pour nous aider à faire face aux rigueurs de l’hiver : tonique, immunostimulant et antiseptique, il est utile en cas de fatigue ou de coup de froid, et vient en même temps stimuler le système digestif et protéger le foie.
  • Le Piment (Capsicum annuum) : Même si ce ne sont pas les mêmes principes actifs qui sont à l’œuvre ici, on peut mettre l’action du piment en parallèle avec celle du gingembre, puisque c’est une plante à la fois réchauffante, circulatoire et stimulante. La capsaïcine, l’un des principes actifs qui la composent, se distingue par sa capacité à augmenter la résistance à la douleur, tout en participant à la réduction de l’inflammation.
  • Le Clou de girofle (Syzygium aromaticum), la Cannelle (Cinnamomum verum) et le Cumin (Cuminum cyminum) possèdent quant à eux d’importantes propriétés antibactériennes et antifongiques : Des chercheurs indiens ont estimé que le cumin était l’épice la plus efficace pour bloquer l’action de certaines bactéries responsables des intoxications alimentaires, mais le clou de girofle et la cannelle ont aussi une puissante action anti-infectieuse. Ces trois épices sont également de précieux soutiens du système digestif : et oui, on n’insistera jamais assez sur l’importance de son rôle sur l’immunité !
  • On finira donc avec deux autres grandes plantes digestives incontournables des currys : la coriandre (Cordiandrum sativum), connue notamment comme grande détoxifiante, et la Cardamome (Elettaria cardamomum), q.

Côté cuisine : Préparer et conserver sa pâte de curry maison pour de délicieux currys express

Préparer un curry est d’autant plus satisfaisant qu’on obtient facilement et rapidement des plats savoureux.

On n’est, bien sûr, pas obligé de préparer une pâte de curry, auquel cas on réunira tous les ingrédients qui la composent directement dans la casserole pour obtenir notre base de sauce. Mais quand on a envie d’en manger régulièrement, on est content de ne pas avoir à chaque fois à peler ses oignons, hacher son ail, ressortir toutes ses épices… on peut donc préparer d'un coup une bonne quantité de pâte de curry, et il ne restera plus qu’à en diluer le nombre de portions souhaité dans du lait de coco pour improviser en un clin d’œil un petit plat bien réconfortant. C’est vrai, il existe de très bonnes pâtes dans le commerce, mais l’avantage de faire la sienne, c’est qu’on peut la modifier pour qu’elle corresponde parfaitement à ses envies !

Les pâtes de curry se conservent bien au réfrigérateur, mais pour prolonger leur durée de vie, on peut en faire… des glaçons. Très pratique : comme ça, le mélange congelé est déjà portionné !

Cliquez ici pour la recette d'un de nos mélanges préférés, à adapter selon vos envies, bien sûr...

Sources :

  • B. B. Aggarwal, D. Yost, Healing spices : how to use 50 everyday and exotic spices to boost health and beat disease, Sterling, 2011.
  • Dr. S. Farrimond, Les épices, conseils d’experts : Les comprendre, les associer, les cuisiner tout simplement, Penguin Random House, 2018.
  • G. C. Jagetia, B. B. Aggarwal, "Spicing up of the immune system by curcumin", Journal of Clinical Immunology, 2007 Jan.
  • Dr. E. Lorrain, Grand Manuel de phytothérapie, Dunod, 2019.
  • Q. Liu, X. Meng, Y. Li, CN. Zhao, GY. Tang, HB. Li, "Antibacterial and Antifungal Activities of Spices", International Journal of Molecular Sciences, 2017 Jun.
  • C. Luu, A. Fournier, 300 plantes médicinales de France et d’ailleurs, Terre vivante, 2020.
  • Dr. A. Mercan, Manuel de phytothérapie écoresponsable, Terre vivante, 2021.
  • M. H. Shahrajabian, W. Sun, Q. Cheng, "Pharmacological Uses and Health Benefits of Ginger (Zingiber officinale) in Traditional Asian and Ancient Chinese Medicine, and Modern Practice", Notulae Scientia Biologicae, 11 (3), 2019.
  • M. Wichtl, R. Anton, Plantes thérapeutiques, Editions Ted & Doc, 2003.
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